Dangerous Animals

F Watchlist

Il y a cinquante ans, Steven Spielberg filmait un prédateur marin rouillé et terrifiait les salles du monde entier. Depuis Les dents de la mer, les requins sont chez eux au cinéma. Certains réalisateurs ont cherché à les exhiber devant les yeux du public tels des prestidigitateurs de fêtes foraines. Mais ils n’avaient rien compris à la leçon de Spielberg: moins on les voit, plus on a peur. La bonne nouvelle de Dangerous Animals: ils y sont presque invisibles. Mieux encore, le film renouvelle de manière rafraîchissante un sous-genre souvent conservateur dans son discours sur les rôles et les identités de genre – ce sont toujours celles et ceux qui s’écartent des normes sociales qui se font manger tout cru, tandis que le mâle alpha finit immanquablement par rétablir l’ordre. Rien de cela dans cette production australienne qui, sans être un brûlot féministe, remet certains schémas vieux comme le monde (patriarcal) au goût du jour. En Australie, un taré sévit aux larges des côtes: promettant aux touristes des baignades parmi les requins, il se débarrasse à bord de son bateau de ses clients masculins et séquestre la gent féminine en soute, avant de livrer les jeunes femmes en pâture aux requins. Armé d’une caméra, le capitaine filme les festins auxquels se livrent les mammifères marins et semble en tirer un certain plaisir. Les choses se compliquent pour lui le jour où il enlève une surfeuse américaine au tempérament affermi, qui va tout mettre en œuvre pour sauver sa peau. Elle pourra compter sur l’aide inattendue d’un jeune promoteur immobilier au cœur d’artichaut, rencontré la veille de son rapt. On se doute bien que le rôle de sauveur ne lui échoira pas, mais le coup de main sera quand même utile. Dans cette distraction estivale bienvenue, les prédateurs sont moins les requins que le mâle détraqué, sur lequel la surfeuse jette un regard plus méprisant qu’effrayé: juste un pauvre type.